De nos jours, tout va plus vite. Les technologies permettent désormais la circulation rapide des informations et le déplacement à grande vitesse des personnes de sorte à augmenter la productivité au niveau de la vie tant quotidienne que professionnelle. C’est aussi
au regard de tels phénomènes que la globalisation a pour effet l’afflux de masses considérables de personnes dans les maxipolis, avec le risque d’appauvrissement des régions à plus faible densité que cela implique.
De l’urgence de ralentir…
Il y a de cela quinze ans, plusieurs petites villes italiennes ont essayé de mitiger et s’opposer aux tendances les plus contradictoires caractérisant notre époque du point de vue territorial en fondant une association de mairies plus particulièrement sensibles à ce type de problèmes, directement inspirée du mouvement Slow Food.
Cittaslow constitue désormais un réseau regroupant cent quatre-vingt-deux villes à travers le monde après une propagation spontanée dans vingt-huit pays différents dont la plupart sont en Europe, mais qui incluent également la Chine, la Corée du Sud, le Japon, les États-Unis, la Nouvelle-Zélande, l’Australie, l’Afrique du Sud, etc. Le réseau français comprend huit villes, dont Saint-Antonin-Noble-Val, Segonzac et Labastide d’Armagnac.
Qu’est-ce qui réunit des cultures aussi différentes les unes des autres ? Et des modèles économiques et politiques aussi disparates ? À la base, l’idée est que la lenteur n’est pas seulement le contraire immédiat de la rapidité, mais qu’elle implique quelque chose de plus, à savoir l’affirmation des valeurs les plus profondes de l’humanité et de toute collectivité. C’est pourquoi il convient de redonner leur juste valeur au terroir, à l’environnement, à l’alimentation, aux rapports sociaux, à la diversité culturelle et, à travers ce retour aux sources profondes, de faire ressurgir les valeurs les plus authentiques de toute collectivité.
Un certain art de (mieux) vivre ensemble…
Les Cittaslow (les « villes lentes ») sont des lieux dans lesquels l’expérimentation est rendue possible notamment du fait même de la taille des communes (moins de cinquante mille habitants) et dont l’intérêt consiste à faire contraste au gigantisme urbain souvent caractérisé par ses inégalités sociales, par une architecture médiocre et par son peu d’attention à la qualité des espaces publics. Pour pouvoir se joindre au réseau, en effet, il faut répondre à plusieurs critères d’évaluation impliquant de nombreux paramètres en termes d’urbanisme, de relations sociales et de protection de l’environnement. Le milieu urbain et l’espace rural doivent trouver des formes réciproques de reconnaissance et d’intégration non seulement au niveau de l’aménagement du territoire, par exemple en prévoyant la mise en place de potagers didactiques destinés aux ménages, mais aussi en établissant des mécanismes appropriés de contrôle des processus de production et de consommation. Beaucoup de villes sont, en effet, liés à certains produits typiques du territoire qui les entoure, qu’il s’agisse de produits agro-alimentaires, artisanaux où artistiques dont on s’efforce de préserver l’authenticité. Cette logique est également renforcée par une attention poussée à la viabilité écologique assurée notamment par le biais d’une gestion avancée de la mobilité, du traitement des déchets et de la consommation d’énergie, d’eau et des ressources naturelles en général. Une attention particulière est accordée à l’héritage architectural, chacune des villes établissant une zone historique à laquelle il est donné une valeur significative. La réhabilitation et la valorisation des centres historiques s’accompagnent de la création de nouvelles architectures qui mettent l’accent sur un profond respect de l’environnement et sur un développement durable.
L’attention portée à l’histoire et à la sauvegarde des ressources naturelles ne s’oppose toutefois pas à la prise en compte des besoins des collectivités en matière d’emploi, de développement et de relations sociales. Un effet important et immédiat de l’initiative est un regain d’attrait des activités culturelles et touristiques. La tendance mise en avant par Cittaslow consiste donc à créer des collectivités solidaires et ouvertes, attrayantes et dynamiques, favorisant la citoyenneté des jeunes et valorisant la diversité des genres et des cultures. Ces objectifs seront certainement utiles pour réévaluer le modèle de collectivité des grandes métropoles.
Giuseppe ROMA
Coordonnateur du Comité scientifique international de Città Slow